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24/10/2009

Aillagon et la mafia de l'art contemporain

 

La connivence en matière d’art contemporain entre politiciens, conservateurs, magnats de la finance devient de plus en plus manifeste à mesure que s’affirme le cynisme de l’oligarchie au pouvoir. C’est ainsi que s’explique l’invasion des lieux les plus prestigieux du patrimoine par le non-art contemporain. En l’occurrence Xavier Veilhan à Versailles et Jan Fabre au Louvre. Dès 2004, Daniel Buren avait été invité par Christine Albanel à montrer ce qu’il appelle son « travail » au château de Versailles. En octobre 2008, Jean Jacques Aillagon transforma le palais de Louis XIV en écrin pour les productions de la manufacture Jeff Koons. Que ce kitsch naïf semble tenu en haute estime par un ex-ministre de la culture est fascinant mais l’explication est autre et n’a rien à voir avec la qualité esthétique de ces objets. Aillagon a des goûts éclectiques. Après Koons, il s’apprête à faire venir Takashi Murakami et Maurizio Cattelan. Qu’ont de commun ces « artistes » ? Ils ne sont pas les auteurs des « œuvres » qu’ils signent, ils ont pour marchand Emmanuel Perrotin et ils figurent dans la collection de François Pinault. Or Aillagon a travaillé autrefois pour cet homme d’affaires. C’est un beau cadeau qu’il a fait à son ancien patron. Un anartiste accueilli dans un grand musée voit sa cote grimper, ce qui permet de juteuses plus-values. Je ne jurerais pas que ce service soit désintéressé. Ces représentants du petit monde de l’art contemporain qui ont fait main basse sur tous les musées sont liés par des intérêts communs et s’entendent comme larrons en foire. Ils mettent à contribution toutes les ressources de l’Etat dans un effort gigantesque pour imposer le non-art au public qui s’en détourne obstinément.

Eux s’en défendent. Ils prétendent qu’en invitant des anartistes ils accroissent la fréquentation des musées d’art classique. A les croire, le bon peuple rechercherait l’art contemporain. Comment se fait-il alors que les musées qui lui sont consacrés ne bénéficient pas de cet engouement ? Pourquoi cet art prétendu doit-il parasiter l’art d’autrefois pour exister ? Si la montagne ne va pas à Mahomet, c’est Mahomet qui va à la montagne. Ayant constaté que les foules ne se pressaient pas dans les musées d’art contemporain, les responsables du ministère de la culture ont décidé de mettre celui-ci en évidence là où sont les gens afin de forcer les amateurs d’art à voir ce qui ne les intéresse pas.

Henri Loyrette, président du Louvre qui s’est engagé, comme par hasard, dans la même voie, déclare que ce palais « est un musée où sont toujours intervenus les artistes vivants » et de citer Hubert Robert, Delacroix et les étudiants des Beaux Arts qui venaient y copier les chefs-d’œuvre. Or Loyrette sait fort bien que les « artistes » qu’il invite ne viennent pas pour se mettre à l’école des grands maîtres. Il sait aussi qu’entre les rayures de Buren et les vastes compositions de Delacroix il n’y a rien de commun. Si bien que le mot « art » n’a pas la même signification selon qu’il s’applique aux premières ou aux secondes. Ce sont des homonymes non des synonymes. L’art a été l’objet d’une usurpation d’identité. Ce tour de passe-passe relève de l’escroquerie intellectuelle. Alliagon et Loyrette cachent à l’opinion que les portes de leur musée largement ouvertes au non-art sont hermétiquement fermé

14/10/2009

L'art selon Philippe Dagen

Dans Le Monde daté du 16 septembre, Philippe Dagen a consacré un article entier à un certain Sarkis. Il s’agirait d’un artiste. Pour nous en persuader en nous procurant une authentique émotion esthétique, le journaliste nous a offert la photographie d’un chef d’œuvre du quidam en question. On y voit une vaste salle nue éclairée par des néons et jonchée de journaux plus ou moins froissés.

Si ce spectacle vous laisse froid, c’est que vous êtes idiot et/ou dépourvu de toute sensibilité artistique. Tel est le texte subliminal qui court entre les lignes de l’apologétique moderniste. Aussi bien êtes-vous sans excuse. Que n’avez-vous saisi la perche que vous tendait le plasticien ? Au lieu de regarder l’œuvre, vous auriez dû lire le titre. Tout était dans l’astuce qu’il recèle : « Le monde est-il lisible ? ». Mais bien sûr, criez-vous, où avais-je la tête ? Si le monde est lisible c’est qu’il est régi par le Logos, sinon c’est plutôt le Chaos qui l’emporte. La philosophie occidentale depuis vingt-cinq siècles n’a fait que broder sur ce thème. A la bonne heure, s’enthousiasme le critique ; vous voyez bien que l’art contemporain pense et qu’il s’adresse à une élite !

Céderez-vous au chant des sirènes et au passage de pommade ? Vous laisserez-vous coopter par l’élite autoproclamée de la finance, des ronds de cuir, et des plumitifs stipendiés ? Allez, un peu de courage et de bon sens! L’artiste doit, certes, penser mais avant tout sur l’art qu’il pratique. Où est l’art dans cette affaire ? Je ne vois que de vieux journaux. Répondez à la question posée par le titre comme elle le mérite : le monde vu à travers la cervelle embrumée de ce pauvre Sarkis est tout à fait illisible et à peine moins celui dans lequel écrit Philippe Dagen. Quant au fonctionnement du petit monde anartistique dont ce dernier est un pilier, il n’est que trop lisible pour qui ne s’en laisse pas conter.     

 

 

11/10/2009

Les frasques de Frédéric Mitterrand et la liberté d'expression

Le problème que soulève l'affaire Mitterrand est en apparence de société mais en réalité politique et fort symptomatique à cet égard. Personne ne reproche à ce monsieur d’être homosexuel et d’ailleurs nul ne s’en soucie. Qu’il livre au public des récits décrivant des pratiques que la morale réprouve, telles que le tourisme sexuel, ne devrait pas non plus inciter quiconque à se gendarmer car rien d’humain n’est étranger à la littérature comme le savaient Ménandre et son imitateur Térence. Mais qu’il ajoute l’exhibitionnisme à la pédérastie et confie à tout un chacun le détail de ses turpitudes à la première personne du singulier justifie des interrogations sérieuses sur l’opportunité de maintenir à un poste ministériel une personne à ce point dépourvue de respect humain. Nous avons, en effet, appris à cette occasion que monsieur Mitterrand a une femme, des enfants et  sans doute aussi des amis. A-t-il pensé à eux en se déculottant de la sorte sans aucune nécessité ? Sont-ils, sommes-nous, ses confesseurs et serions-nous chargés de lui infliger par notre réprobation muette la pénitence que son sentiment de culpabilité désire comme expiation ? Mitterrand ne souffre en effet qu’une réprobation muette. Il l’a bien fait sentir à Laurence Ferrari.

Ne vous y méprenez pas. Il y a plus dans cet épisode de notre vie publique que des enjeux moraux, encore que ceux-ci ne soient pas indifférents. Un pays européen, la Suède, fait du recours au sexe tarifé un délit. Cela suffit pour empêcher de considérer les mœurs de ce triste sire comme anodines. Il est naturel que des personnalités politiques s’en émeuvent. La question qui se pose est pourquoi ils le font maintenant. Le livre est paru en 2005 et s’est vendu à 200.000 exemplaires. Pour que le scandale éclate, il a fallu que Marine Le Pen le lise et s’en empare (en mélangeant tout). Elle fut vite rejointe, une fois n’est pas coutume, par des élus socialistes, inquiets de voir un nom qui leur est cher traîné dans la boue de Bangkok par celui qui en a tant profité pour devenir directeur de la Villa Médicis puis ministre. Comment se fait-il que depuis plus de quatre ans personne n’ait relevé le contenu scabreux, voire choquant de son livre ? Ne tournons pas autour du pot. Le politiquement correct dominant interdit de mettre en cause un adepte des « amitiés particulières ». Les journalistes des grands médias et les politiciens (nos porte-parole) se sont tus (ils nous ont donc imposé silence), ils se sont autocensurés, ils n’ont pas osé moufeter cédant à la terreur. La preuve en est qu’aussitôt le tabou violé, tout le monde s’est engouffré dans la brèche. Voilà où nous en sommes à l’époque des droits de l’homme et de la liberté d’expression.

 

 

 

Voir mon site http://www.kostasmavrakis.fr

12:55 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (0)

07/10/2009

Hans Jonas et la théodicée

Le philosophe allemand Hans Jonas (1903 – 1993) est célèbre pour son livre Principe responsabilité (1979), plus que jamais d’actualité, dans lequel il fonde nos devoirs envers les générations futures face au développement incontrôlé de la technique et du productivisme. Je me propose de partir d’un autre de ses écrits : Le Concept de Dieu après Auschwitz (1987) pour réfléchir sur le problème de la théodicée tel qu’il se pose aujourd’hui mais sans prétendre discuter sur toute la ligne les thèses hétérodoxes de Jonas. Selon lui, en créant le ciel et la terre, Dieu s’est dépouillé de sa divinité. Affecté par ce qui se passe dans le monde il en souffre. Il est en devenir et donc interne au temps, ce qui exclut qu’on le tienne pour transcendant. Le principal argument de Jonas est qu’un Dieu à la fois tout puissant et bon serait insondable. Or Dieu est insondable, mystérieux et transcendant ce qui ne signifie pas, on le verra, qu’on ne peut rien en dire de sensé si ce n’est sous forme de négation comme le veut la théologie apophatique. Pour comprendre l’interrogation douloureuse qu’exprime Jonas, il faut tenir compte de la spécificité de sa religion. Le judaïsme voit en Dieu « le seigneur de l’Histoire » et dans le monde le lieu de la rédemption. De là vient la question « quel Dieu a pu laisser faire Auschwitz ? » Le Christ ayant dit : « mon royaume n’est pas de ce monde », le chrétien est moins embarrassé mais il l’est quand même car pour lui aussi l’existence du mal pose un problème. Il serait outrecuidant de ma part de prétendre le résoudre mais je voudrais proposer quelques idées pour faire avancer le débat.

Dieu n’est pas là pour empêcher l’homme d’exercer sa liberté ou pour corriger ses fautes.

Ce qui nous paraît un mal absolu peut avoir sa place nécessaire dans le plan de Dieu. Ignorants que nous sommes de l’avenir et des enchaînements de causes et d’effets qui y conduisent, il serait bien naïfs de notre part de prétendre nous immiscer dans le gouvernement du très haut, in Gottes Regiment, disait Luther.

La formulation du Credo qui parle de Dieu comme d’un père « tout puissant » (« patrem omnipotentem ») doit être entendue comme une hyperbole, en un sens relatif et non absolu. Selon saint Thomas d’Aquin, Dieu ne peut se contredire ni faire que ce qui a eu lieu n’ait pas eu lieu. Or s’il contredisait les lois de la nature, il se contredirait lui-même.

Plusieurs rabbins ont fait scandale (on se demande pourquoi) en expliquant la Shoah comme les prophètes d’Israël ont expliqué d’autres catastrophes qui se sont abattues sur leur peuple à savoir comme un châtiment pour ses péchés. La Shoah cependant comporte une signification supplémentaire en tant que métaphore du mal absolu. Elle confirme l’interprétation chrétienne de la faute d’Eve et d’Adam comme péché originel. Ceux qui ont commis ce crime étaient des hommes comme les autres. Cette abomination montre de quoi l’homme est capable. Nous en sommes capables parce que nous sommes tous les mêmes et pareils à notre premier ancêtre. Nous n’avons pas hérité de sa faute mais nous pouvons, comme lui, désobéir à Dieu et obéir au serpent. Les Nazis ont montré ce qui arrive quand on pousse l’orgueil jusqu’aux dernières extrémités en prétendant décider à la place de Dieu de ce qui est le bien et de ce qui est le mal.

Auschwitz doit inciter à s’interroger non sur le concept de Dieu mais sur le concept de l’homme.