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29/05/2010

Uniformisation ou génocide (?)

La conception très particulière de l'universalisme que défend Badiou implique de privilégier le Même au détriment de l'Autre et le conduit à rêver d'un métissage général et global. Ce processus effacerait les « vieux particularismes auxquels revint l'honneur d'avoir créé les valeurs esthétiques et spirituelles qui donnent son prix à la vie ». Comme à Lévi-Strauss que je viens de citer, cette perte de diversité culturelle me semble un appauvrissement et un facteur de stérilité. Je pense en outre que Badiou n'a pas le sens des réalités. La preuve en est qu'il prône un Etat Binational en Palestine et la fusion de la France et de l'Allemagne. Ce qui s'y oppose dans les deux cas ce sont des différences irréductibles et potentiellement génératrices de conflits entre les deux peuples ainsi réunis. Le vieux maoïste qu'il est  devrait se souvenir d'une citation du président : « la différence est déjà une contradiction ». Mais pour Badiou ce sont là des considérations qu'il serait désastreux de prendre en compte. « Toute identification nationale, nous dit-il, est une identification des « autres » et celle-ci est un premier pas d'une « marche au massacre »[1]. Une fois encore, le sophiste triomphe chez Badiou. Depuis que le monde existe on a distingué les membres d'une tribu, les sujets d'un prince, les vassaux d'un seigneur, les citoyens d'une cité ou d'un Etat sans que cela conduise à des génocides. Ces crimes du XXe siècle ont eu, de toute évidence, d'autres causes que le classement (pour le coup universel) des individus en termes d'appartenance à un groupe social.


[1] Cf. Badiou / Finkielkraut : L'explication, Lignes 2010, p 71.

Commentaires

Au contraire! L'histoire est une vallée de larmes! Tourner le dos à l'universel conduit toujours au malheur.

De ce point de vue, le chrétien que vous dites être ne saurait ignorer la beauté de l'horizon universel, même s'il s'agit là d'un universalisme restreint ou incomplet puisque dépendant d'un mythe.

D'autre part, si vous lisez Badiou, il est banal de remarquer que chez Badiou coexiste une tension très marquée entre le particulier et l'universel.

Une tension qui n'est justement pas une opposition étant donné que toute vérité est située tandis que l'universel abstrait mène au désastre.

Écrit par : lola | 31/05/2010

A certains égards vous avez raison car Badiou a toujours fait sienne la maxime de Hegel selon laquelle l'universel se donne dans le particulier. Mais cela vaut pour les vérités (au sens où il les entend), non pour les groupes humains auxquels il ne reconnaît pas le droit de défendre leur particularité. Surtout si cela devrait se traduire par une limitation des flux migratoires.

Écrit par : mavrakis | 01/06/2010

Justement. La politique est elle même une procédure de vérité relative au collectif. L'émancipation des "groupes humains" ou de l'humanité est un souci central et intégralement articulé à l'universel pour Badiou.

Un universel toujours situé nous l'avons dit.

Dans ces conditions je ne comprends pas le fondement de votre objection.

Nous conviendrons que tous les particularismes ne sont pas aimables tandis que d'autres le sont et nous savons que Badiou disait déjà dans théorie du sujet son attachement à certains particularismes français.

Mais aimerons-nous la tradition particulière de la xénophobie française, celle d'un Drumont par exemple? Certes non.

Il est donc intenable de vouloir défendre le particulier par principe sans poser la question de l'universel.

L'interêt français ou occidental n'est pas à défendre par principe mais si et seulement si il est conforme à l'interêt universel.

Ne substituons pas l'émancipation nationale (ou pire: raciale ou ethnique) à l'émancipation pour tous.

Voilà une recommandation parfaitement homogène aux principes chrétiens qui sont les vôtres.

L'amour de son prochain est indifférent aux nationalités.

Écrit par : lola | 01/06/2010

1) Votre phrase sur "l'émancipation de l'humanité" sonne bien. Dommage qu'elle soit creuse. L'humanité serait-elle asservie? Mais à qui? A des extra-terrestres sans doute. Exigez donc la justice sociale et plus d'égalité en renonçant aux clichés sur "l'émancipation". Ils sont vraiement usés jusqu'à la corde.
2) Je ne me fais pas l'avocat des particularismes en général dont certains, les Islamistes par exemple, sont odieux, mais du droit de tout peuple, de tout groupe caractérisé par une culture, de défendre celle-ci sur son territoir dans ce qu'elle a d'unique. Claude Lévi-Strauss a parfaitement expliqué pourquoi.
3) Aucun intérêt universel, même l'intérêt pour tous les hommes de préserver la biosphère, n'est opposable à celui de la France et de l'Occident car ces intérêts ne s'opposent justement pas.
4) Je ne pense pas que la xénophobie soit une tradition française. Etant un étranger installé depuis longtemps ici (mais toujours pas "d'ici") je n'ai pour ainsi dire jamais rencontré de xénophobe. J'ai en revanche croisé assez souvent des militants animés d'une haine viscérale de la France. Je les considère commes des racistes.

Écrit par : Mavrakis | 08/06/2010

Je voudrais ajouter une remarque en réponse à Lola qui étant athée me donne néanmoins des leçons de christianisme. Celui-ci reconnaît les particularités ethniques (culturelles) et nationales (culturelles et politiques) ainsi que la possibilité de leurs conflits. Ce n'est qu'"en Jésus-Christ" qu'il n'y a, selon Saint Paul "ni Juif, ni Grec"; c'est-à-dire du point de la vérité de son message. Jésus-Christ ne prétendait pas abolir les guerres. Il ne disait pas aux soldats "refusez le service, choississez un autre métier" mais "ne pressurez pas le peuple, contentez-vous de votre solde".

Écrit par : mavrakis | 12/06/2010

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