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17/06/2007

Badiou le rebelle

Pour illustrer la possibilité d'un art non-classique, Badiou cite un texte de Breton d'une facture des plus classiques. L'équivalent pictural d'un tel écrit pourrait ressembler à un tableau d'Ingres.

Badiou en retient surtout l'éloge de la rebellion serait-elle "extrêmement coûteuse en vies, en douleurs, en drames" (p.203). "Une des puissantes formes de la passion du réel (...) aura été, jusqu'à ces dernières années le refus hautain de comparaître devant le tribunal truqué des résultats économiques, sociaux, "humains" et autres" (ibid.). Par "autres" il faut surtout entendre le "sacrifice" de l'art (c'est le mot de Badiou) sur l'autel de l'avant-gardisme.

Notre ami ne se rend pas compte à quel point le pathos de la rebellion est daté (années 30-40). Aujourd'hui, la rebellion est une posture professionnelle, "un positionnement rentable", comme le faisait remarquer Guillaume Allary dans Le Monde du 31 mai 2007. Voici quelques extraits de cet article : "Brian Molko, chanteur rock, vient de porter plainte contre un hebdomadaire qui avait publié un photo de lui en train de promener son bébé en poussette (...). Motif? Atteinte à son image de marginal". (...) il "demande réparation (...) parce qu'on n'a pas dit du mal de lui.(...) Un artiste présenté comme androgyne, sulfureux et provocateur, bref comme un rebelle, reconnaît que ce prortrait n'est qu'une construction médiatique et qu'en plus c'est son fond de commerce".  



 

18:27 Publié dans Culture | Lien permanent | Commentaires (0)

13/06/2007

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La désacralisation de l'art selon Badiou



Badiou croit observer au vingtième siècle une oscillation entre romantisme et « liquidation de l’art comme pensée », entre « pathos romantique » [des manifestes surréalistes] et « iconoclastie nihiliste » [des dadaïsmes et néodadaïsmes] (p 218). En réalité ces deux tendances ne s’opposent guère et produisent à peu près les mêmes résultats. Malévitch est un abstrait mais ses carrés sont des ready made géométriques. Il est aussi le précurseur des peintres de monochromes car le fond blanc du carré noir peut être considéré comme faisant partie du cadre. Miro est également un abstrait tout en portant l’étiquette surréaliste. Ainsi l’« art » avant-gardiste a été proclamations grandiloquentes et creuses plus néant iconoclaste et vaine dérision. Le surréalisme n’est-il pas issu de Dada ? Ce qui permet à Badiou d’échapper à cette conclusion, c’est l’amalgame de toutes les disciplines artistiques : celles que l’avant-gardisme a dévastées et celles (comme la littérature) qui sont restées vivantes vaille que vaille.
Certes, Badiou évoque « l’artiste véritable » qui « trace une voie intermédiaire entre romantisme et nihilisme » (pp 218-9) mais il n’en cite aucun. S’il y en a auxquels il pense, il se garde de les nommer et surtout de nous montrer leurs « œuvres » (gestes ou traces) tant leur nullité (pour parler comme Baudrillard) paraîtrait évidente. Ces « artistes véritables » accomplissent « le programme anti-romantique d’une désacralisation de l’œuvre et d’une désublimation de l’artiste » (p 224). Pour faire cette constatation banale et qui traîne partout, il a fallu à Badiou le secours des analyses de Hegel sur le bon et le mauvais infini. D’autres se sont contentés, plus sobrement, de rappeler Duchamp et ses moustaches sur la Joconde. Si vous lui faites remarquer que ces moustaches visent, certes, à désacraliser une œuvre emblématique mais sont par ailleurs un canular de potache des plus faciles, si vous ajoutez que dans le prétendu art du vingtième siècle il n’y a ni œuvres à proprement parler, ni l’« invention formelle » dont il se gargarise fautes de formes inventées, il n’en disconviendra pas mais rétorquera gravement que ce siècle « voit la forme comme ce que l’acte artistique autorise de pensée nouvelle » (souligné par B.). Jusqu’à notre époque la forme s’opposait à la matière ou au contenu. Le vingtième siècle a changé tout cela. Désormais la forme doit être comprise au sens où on parle de « formalisation » (mathématique). Nous avons affaire à « un art de la formalisation et non de l’œuvre, […] un art de la surhumanité (souligné par B.) (pp 225, 226).
Qui se prend pour un surhomme tombe dans le soushumain, pourrait-on lui rétorquer en pensant à Congo le peintre abstrait simien dont les œuvres ont remporté un grand succès lors de leur vente aux enchères à Londres l’année passée.
Badiou ne tente même pas de nous expliquer pourquoi il faudrait désacraliser l’art jusqu’à l’anéantir. A croire que pour lui seules les positions extrêmes sont acceptables. Ne pourrai-on valoriser l’art sans le sacraliser ? Et d'ailleurs pourquoi ne pas le sacraliser? On pourrait aussi lui demander quelle est la « pensée nouvelle » qu’autorisent les bandes de Buren et les petits carrés alignés de Toroni (grand prix national de peinture en 1995). Pourtant les « ruptures formelles » dont il parle sont de ce type. Celles que je viens de citer remontent à la décennie des années soixante dont il est tellement nostalgique. Ne doit-on pas y voir une réitération de la rupture avec l’art en quoi se résume dans ce domaine l’ambition d’un siècle si fertile en barbaries de toutes sortes ? Quand notre philosophe envisage cette possibilité il interprète le sacrifice de l’art comme un acte de courage philosophique consistant à "ne pas céder sur le réel" et de plus il laisse entendre que rompre avec l’art serait encore de l’art. En tout cas, dans sa vision des choses, la notion de non-art est à priori exclue Pour étayer ses thèses il ne se donne pas la peine et ne prend pas le risque de construire une argumentation. Il lui suffit de s’appuyer sur les évidences du discours dominent et de parler comme tout le monde en qualifiant d' art le non-art. Son livre est à cet égard une gigantesque pétition de principe.

La politique et le sida


Je rappelle qu'Alain Badiou admet quatre procédures de vérité (à distinguer de la véridicité), qui ensemble conditionnent la philosophie. Elles relèvent de la science, de l'art, de la politique et de l'amour. En bonne logique, et selon son propre système, il aurait dû en ajouter une cinquième: la religion. Je pourrais le prouver mais ce sera pour une autre fois. Je me contenterai pour le moment de renvoyer à son livre sur saint Paul et à ce qu'il appelle "le paradoxe chrétien" dont il dit qu'il est pour lui "un des noms possibles du paradoxe des vérités", à savoir "que l'éternité doit être rencontrée dans le temps" (Cf. Logiques des mondes p 450).

Après avoir soumis à un examen critique les thèses sur l'art avant-gardiste de Badiou, j'ai l'intention de discuter aussi, le moment venu, sa politique. Aujourd'hui je proposerai une petite note sur un point particulier.

Dans Le siècle (p 16), le philosophe dénonce "nos démocraties, tout à fait humanitaires quand il s'agit de bombarder la Serbie ou l'Irak", mais qui "ne se soucient pratiquement pas de l'extermination de millions d'Africains par le sida". Pour diverses raisons, dit-il, "on ne donnera pas des médicaments aux mourants africains. Seulement aux Blancs démocrates". 

On sait que le problème est maintenant pratiquement résolu. Une proportion importante et croissante d'Africains reçoivent des antirétroviraux sauf en Afrique du sud où le chef d'Etat Thabo Mbeki s'y oppose à cause de ses idées absurdes sur les causes et le traitement du sida. Il est vrai qu'en 2005, date de parution du livre cité, ce que je viens de dire n'était pas encore fait. Mais si les accusations de Badiou étaient justes, les progrès réalisés en matière de lutte contre la pandémie n'auraient jamais eu lieu. Il incrimine le racisme et les préjugés politiques. On refuserait les médicaments aux Africains pour n'en donner qu'aux Blancs démocrates et cela par la faute de "nos démocraties"! Pourtant chacun sait que dans nos hôpitaux on ne repousse pas les noirs et on ne leur demande pas non plus s'ils sont démocrates.

Il me semble qu'on ne doit pas mettre sur le compte d'un régime politique ce qui est dû à un système économique, le capitalisme, dont la propension à la philanthropie est notoirement limitée. Quant au racisme, il est moins répandu que Badiou ne le laisse entendre en Europe et beaucoup plus ailleurs. Certains seraient tentés de lui demander pourquoi les Européens devraient faire preuve de munificence à l'égard de populations qui les tiennent pour des ennemis en raison de leur couleur comme on l'a vu à la conférence de Durban quand la foule criait "un Blanc, une balle". Dans les pays européens on n'a jamais manifesté avec des mots d'ordre de ce genre.

    

08:59 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (0)