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11/06/2007

Dieu et le Mal


Ayant achevé provisoirement ma critique des thèses de Badiou sur l'art, j'exprimerai en quelques notules mes réactions à certaines de ses idées sur des problèmes philosophiques ou politiques.

Badiou se réfère à la "longue histoire (...) de l'identification théologique du Mal au non-être. Si en effet le Mal est, s'il y a une positivité ontologique du Mal, il s'ensuit que Dieu en est le créateur, et donc le responsable" (pp 14-15).

Le Mal a sa place nécessaire dans l'économie de la création de même que les ombres contribuent à la luminosité d'une peinture. C'est en ce sens et pour cette raison que l'oeuvre de Dieu est globalement bonne, en tout cas la meilleure possible. Etant donné que les relations de causes à effets s'enchaînent et que tout se tient; étant donné aussi que l'auteur de l'univers, selon saint Thomas d'Aquin, ne peut se contredire, ni créer des choses incompatibles entre elles, enlever le Mal se paierait d'un moindre Bien. Au total, un tel monde ne serait pas meilleur. Sur ce point la théodicée de Leibniz est imparable.

10/06/2007

Badiou champion paradoxal de l'avant-garde

Badiou a pris nettement parti pour l'art prétendument avancé du vingtième siècle "volontiers iconoclaste" dit-il. Cet art  serait "l'action même". En ce sens la position du philosophe n'est nullement ambigüe. Il ne fait cependant pas de difficultés pour reconnaître que dans ce type de propositions l'"oeuvre" est presque rien et se réduit au geste légitimé par un quelconque bla-bla pseudothéorique. Est-ce à dire que l'amphigouri est là pour masquer la "nullité" (Baudrillard) ou la stérilité de ce qu'il protège? Badiou s'interdit d'aller aussi loin, mais cela ne l'empêche pas de tenir l'iconoclastie en art pour analogue au fascisme en politique et à l'obscurantisme en science (Cf. Logiques des mondes p 87). Voilà qui ne fera pas plaisir à certains de ses amis.

06/06/2007

Fiction et réalité

Si Alain Badiou distingue les quatre types de vérités, c'est pour mieux les ramener les unes aux autres. Il établit des parallèles aventureux entre amour et politique, politique et science, science et art, allant jusqu'à mettre sur le même plan la fiction et l'histoire. Pour étudier ce qu'est un "site" événementiel, il prend pour exemple l'amour de Julie et de Saint Preux dans le roman de Rousseau tout comme la Commune de Paris (Cf. Logiques des mondes, pp 383-401) Pour Badiou, notre rapport à une oeuvre littéraire et notre rapport aux événements politiques sont de même nature. Désireux d'excuser l'indifférence des militants communistes devant "les signes objectifs de la cruauté" stalinienne, il évoque l'Iliade dont il dit qu'elle est "une succession ininterrompue de massacres". "C'est dans cette même indifférence qu'on s'installe, écrit-il, en lisant l'Iliade, parce que la puissance de l'action est plus intense que ne l'est la sensiblerie morale" (Le Siècle p 55).

D'abord un massacre est une tuerie à grande échelle d'être humains sans défense. Dans l'Iliade il y a seulement des affrontements entre combattants. Ensuite, c'est l'art du poète qui nous fait ressentir la violence comme héroique et le récit épique comme sublime. Badiou l'oublie quand il écrit que "le siècle a été une Iliade subjective". Il faut croire que pour lui lire le journal ou lire Homère c'est à peu près la même chose.