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30/09/2012

Le libéralisme du grand capital et la civilisation

On a raison de considérer le libéralisme, dont la puissance américaine est le bras armé, comme le pire ennemi de la civilisation et de l’humanité. Immoral, il nie toute autre motivation que le calcul égoïste en vue de maximiser l’utilité individuelle. Selon cette logique  l’enrichissement de quelques uns doit l’emporter sur toute autre considération. Puisque cela rapporte, les forêts tropicales, notre poumon, sont détruites et remplacées par des plantations produisant de l’huile de palme nocive à la santé. Pour la même raison les océans sont vidés de  leurs poissons et, acidifiés par le gaz carbonique, deviennent graduellement impropres à entretenir la vie, sauf celle des méduses. Ensuite le libéralisme s’oppose aux identités enracinées dans un héritage, une culture, une terre, un paysage. C’est qu’il ne supporte pas ce qui pourrait faire obstacle, si peu que ce soit, aux flux sans frictions de marchandises, de capitaux,  d’hommes voire de publicités anglophones. Or la création des œuvres d’art et des textes littéraires suppose cet enracinement.

Qu’on se pose la question : pourquoi les Etats-Unis et l’Angleterre son appendice ancré au large de notre continent insistent aussi lourdement pour que la Turquie soit accueillie au sein de l’Union Européenne ? Depuis que ce pays a présenté sa candidature à l’adhésion il s’est islamisé sans que l’U.E. y trouve à redire. Le résultat est que ses ressortissants non-musulmans ne sont pas considérés comme de vrais Turcs. Les minorités musulmanes non-sunnites comme les Alévis sont discriminés, les Kurdes sauvagement opprimés. Les chrétiens orthodoxes n’ont même pas le droit d’utiliser leur bibliothèque de Halki. La Turquie n’est pas une nation démocratique et ne partage pas nos valeurs. La justice y est aux ordres, l’état de droit un rêve. L’étudiante franco-turque Sevil Sevimli en a fait l’expérience quand, en visite dans le pays de ses parents, elle fut jetée en prison parce qu’elle possédait un exemplaire du Manifeste communiste de Marx et d’Engels et qu’elle avait assisté à des concerts et autres manifestations parfaitement légales. Pendant trois mois elle a partagé le sort de plus de 700 étudiants turcs non moins innocents qu’elle mais qui, dépourvus de passeport étranger, moisissent dans les geôles d’Erdogan sans savoir quand ils en sortiront.  Ankara est en conflit avec les Chypriotes dont elle a envahit l’île. Elle l’est aussi  avec les Arméniens du Caucase et les Kurdes des confins de l’Irak, de l’Iran et de la Syrie. L’Europe devra-t-elle un jour lui manifester sa solidarité en lui prêtant main forte contre ces peuples lointains ? En fait, les Américains se font les parrains des Turcs pour dissoudre l’Europe dans l’Asie et détruire son unité civilisationnelle. De la sorte elle ne deviendra jamais une puissance autonome  ayant une ambition  propre.

Le libéralisme, idéologie du grand capital international, a favorisé en outre la substitution du non-art à l’art. Ce dernier, principale composante de toute civilisation, ne peut que gêner l’homogénéisation intégrale de l’espace marchand car les civilisations sont hétérogènes et multiples. Le vide du non-art est tellement plus congruent au « doux commerce » comme disait Montesquieu. Celui qui n’a rien à dire ne risque pas de contredire qui que ce soit. Le contenu de l’art  est presque toujours  religieux et nos maîtres d’école nous ont appris que religion signifie guerre de religions. Il est beaucoup plus pacifique de déclarer avec John Cage : « I have nothing to say, so I say it » : (je n’ai rien à dire, donc je le dis). On se souvient que John Cage fut l’auteur d’une parfaite illustration de la notion de  « non-art » en donnant un « concert » du silence. Je n’étonnerai personne en exprimant ma préférence pour Le Messie de Haendel. L’hyperclasse mondiale dominante organise l’oubli de Haendel en tant que musique vivante en rendant impossible la création d’œuvres véhiculant un égal potentiel d’émotion esthétique. Elle est responsable de la barbarie qui se répand insensiblement et paralyse la vie de l’esprit.