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07/11/2010

"L'émancipation" cache-sexe de Rancière

Personne ne croit aujourd’hui que l’opposition gauche/droite héritée de la Révolution française soit particulièrement pertinente dans le débat d’idées. Elle fait tout au plus partie des étiquettes commodes à l’usage des journalistes et des politiciens. Pourtant Rancière (et Badiou), qui se prennent pour de profonds penseurs, ne peuvent se passer de ce genre de catégories simplistes surtout quand ils s’adressent aux médias. On les comprend. Ils éprouvent le besoin incoercible de se classer du bon côté. Quel est ce côté ? That is the question. Impossible de se réclamer sans ridicule du prolétariat, de la plèbe, des peuples luttant pour leur indépendance nationale, des lumières, du progrès. Faute de mieux, nos philosophes qui ne se sont pas trop creusé la tête, se sont rabattus sur des dichotomies plus floues. Pour Rancière, il y aurait la « domination » (concept emprunté à Bourdieu) qui fait correspondre l’ordre du pouvoir et celui du savoir. Lui ferait face « la pensée de l’émancipation » qui soutient le droit des « incompétents » à penser l’avenir et à décider du moment d’agir. L’auteur du Maître ignorant est, on le voit, fidèle à la ligne qu’il s’est tracée depuis longtemps. A première vue, on serait tenté d’y voir une pensée généreuse favorable à ceux d’en bas mais si l’on regarde de plus près, on risque d’être déçu. Rancière se reconnaît dans une communauté de gens qui réunit « les milieux de l’activisme politique, les activistes du monde de l’art et les chercheurs ». Ces derniers, comme le contexte nous le fait comprendre, ont déjà trouvé. Ils ont trouvé les têtes creuses des agitateurs prétendument de gauche engagés dans une alliance contre nature avec la spéculation anartistique. Tout cela se passe dans la tête de Rancière qui par ailleurs éprouve beaucoup d’estime pour les « études post-coloniales, les travaux sur le genre et la critique des identités » dans le monde anglo-saxon. Il ne s’est peut-être pas aperçu que les premières alimentent le racisme anti-européen, que les deuxièmes détournent l’attention de tâches politiques vitales et urgentes et que les troisièmes désarment ceux qui osent critiquer l’islamisme. Il reproche même à ces derniers de « déverser des fantasmes anti-arabes et antimusulmans ».   

Je signale que je prononcerai demain mardi 9 novembre à huit heure une conférence sur "La décroissance" au centre Saint Paul, 12, rue Saint Josèphe, M° Sentier.

14/07/2010

Une émancipation autoritaire

Deux petites remarques critiques sur des points abordés dans le récent livre d'entretiens d'Alain Badiou avec Fabien Tarby : La philosophie et l'événement.

Badiou veut imposer l'abolition de la division du travail et l'effacement des identités ethniques. Pour opérer de telles transformations et contraindre si fortement la nature humaine, il lui faudrait un pouvoir dictatorial féroce. Comment celui-ci serait-il compatible avec l'idéal de l'émancipation constamment seriné par Badiou? Peut-on émanciper en privant de liberté? Pour Badiou, la réponse est oui et c'est pourquoi il se réclame de Lénine, de Staline, de Mao Tsé-toung, voire de Pol Pot.

Badiou insiste sur le fait que "la notion d'ennemi est toujours à l'horizon de la politique" (p 12). Il est exact que la première question à laquelle l'homme d'Etat doit répondre concerne la désignation de l'ennemi. Cela ne doit pas le conduire au manichéisme. Il doit en effet tenir compte de ce que 1° nous avons des intérêts communs même avec nos pires ennemis; 2° l'ennemi d'aujourd'hui pourra devenir l'allié de demain. 

N. B. Il y a quelques jours j'ai dû supprimer à mon grand déplaisir un commentaire interminable (et confus). Les commentaires doivent être courts, concis et clairs. Je m'astreint moi-même à cette règle quand il m'arrive de répondre.