Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

13/06/2007

La politique et le sida


Je rappelle qu'Alain Badiou admet quatre procédures de vérité (à distinguer de la véridicité), qui ensemble conditionnent la philosophie. Elles relèvent de la science, de l'art, de la politique et de l'amour. En bonne logique, et selon son propre système, il aurait dû en ajouter une cinquième: la religion. Je pourrais le prouver mais ce sera pour une autre fois. Je me contenterai pour le moment de renvoyer à son livre sur saint Paul et à ce qu'il appelle "le paradoxe chrétien" dont il dit qu'il est pour lui "un des noms possibles du paradoxe des vérités", à savoir "que l'éternité doit être rencontrée dans le temps" (Cf. Logiques des mondes p 450).

Après avoir soumis à un examen critique les thèses sur l'art avant-gardiste de Badiou, j'ai l'intention de discuter aussi, le moment venu, sa politique. Aujourd'hui je proposerai une petite note sur un point particulier.

Dans Le siècle (p 16), le philosophe dénonce "nos démocraties, tout à fait humanitaires quand il s'agit de bombarder la Serbie ou l'Irak", mais qui "ne se soucient pratiquement pas de l'extermination de millions d'Africains par le sida". Pour diverses raisons, dit-il, "on ne donnera pas des médicaments aux mourants africains. Seulement aux Blancs démocrates". 

On sait que le problème est maintenant pratiquement résolu. Une proportion importante et croissante d'Africains reçoivent des antirétroviraux sauf en Afrique du sud où le chef d'Etat Thabo Mbeki s'y oppose à cause de ses idées absurdes sur les causes et le traitement du sida. Il est vrai qu'en 2005, date de parution du livre cité, ce que je viens de dire n'était pas encore fait. Mais si les accusations de Badiou étaient justes, les progrès réalisés en matière de lutte contre la pandémie n'auraient jamais eu lieu. Il incrimine le racisme et les préjugés politiques. On refuserait les médicaments aux Africains pour n'en donner qu'aux Blancs démocrates et cela par la faute de "nos démocraties"! Pourtant chacun sait que dans nos hôpitaux on ne repousse pas les noirs et on ne leur demande pas non plus s'ils sont démocrates.

Il me semble qu'on ne doit pas mettre sur le compte d'un régime politique ce qui est dû à un système économique, le capitalisme, dont la propension à la philanthropie est notoirement limitée. Quant au racisme, il est moins répandu que Badiou ne le laisse entendre en Europe et beaucoup plus ailleurs. Certains seraient tentés de lui demander pourquoi les Européens devraient faire preuve de munificence à l'égard de populations qui les tiennent pour des ennemis en raison de leur couleur comme on l'a vu à la conférence de Durban quand la foule criait "un Blanc, une balle". Dans les pays européens on n'a jamais manifesté avec des mots d'ordre de ce genre.

    

08:59 Publié dans Société | Lien permanent | Commentaires (0)