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28/11/2008

Comment certains "chercheurs" manipulent les données statistiques

Dans ma rubrique " Ne vous laissez pas endoctriner "  je voudrais vous proposer quelques observations sur l’article paru dans "Le Monde" du 27 novembre de Nathalie Guibert à propos d’un tableau statistique publié par le Ministère de l’Intérieur. Ce tableau retrace l’évolution de la délinquance et celle de la part imputée aux mineurs depuis le milieu des années soixante-dix. Le total des personnes  mises en cause entre 1974 et 2007 est passé de 700.000 à 1.150. 000 environ, tandis que dans cet ensemble la proportion des mineurs augmentait de 10% à 18%, allant de 70.000 en 1974 à environ 200.000 en 2007.

Voilà ce que disent les statistiques nues mais la journaliste n’aime pas ces chiffres, elle  voudrait à toute force en tirer des conclusions plus conformes à ses préjugés idéologiques. Pour sa démonstration, elle exploite une note publiée sur Internet par un chercheur au CNRS Laurent Mucchielli. Cet « expert » trouve plus commode de ne pas prendre en considération la période de trente-trois ans relativement longue, et donc significative, du tableau et se concentre sur un laps de temps beaucoup plus court qu’il fait commencer à 1998. Ca l’arrange parce qu’en cette année la proportion des mineurs ayant marqué un pic il peut prétendre, résume Guibert, « que la part des moins de 18 ans dans l’ensemble des personnes mises en cause […] n’a cessé de baisser depuis dix ans » [en réalité depuis neuf ans]. Or un coup d’œil au graphique permet de voir que cette part a justement cessé de baisser depuis trois ans. Le reste des commentaires est à l’avenant. Le point essentiel est que pour dégager des tendances il faut une période longue. Si elle est courte, on peut faire dire ce qu’on veut aux statistiques en choisissant leur point de départ. Pourquoi Laurent Mucchielli fixe-t-il son curseur neuf ans auparavant et pas dix? Parce que sa démonstration en eut été affaiblie. Elle eut été complètement renversée s'il avait comparé les chiffres de 1992 (quinze ans plus tôt) avec ceux de 2007. Ses conclusions se basent sur une simple fluctuation découpée arbitrairement pour les besoins de la cause.

  

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24/11/2008

Vive la décroissance

Les responsables de la crise ne sont pas seulement les spéculateurs qui prétendaient faire fortune à crédit mais aussi nos grands experts en économie. Le Monde du 23-4 nov. 2008 nous offre un exemple des sottises qu’ils nous vendent sous forme d’évidences. Monsieur Pierre-Antoine Delhommais y écrit ceci : « Avec une croissance négative […] la planète va certes émettre moins de CO2 mais » il y aura plus de chômage et de misère. « Les riches détruisent peut-être la planète, mais celle-ci semble quand même un peu mieux se porter – et encore plus ses habitants- quand l’économie crée des richesses ».

L’économie dont M. Delhommais fait l’éloge crée surtout du superflu en détruisant le nécessaire. Le niveau actuel de la production suffit pour couvrir tous les besoins à condition qu’elle soit équitablement répartie dans chaque pays. La crise est due à l’aggravation depuis trente ans des inégalités qui prive les salariés des moyens d’acheter ce qu’ils fabriquent. Elle corrige la surproduction par rapport à la demande solvable. Une économie est plus équilibrée, donc en meilleure santé, quand elle est moins injuste. Il faudrait aussi que la population à l’échelle mondiale reste stable en nombre et ne soit pas encouragée à exploser dans les régions les moins aptes à nourrir les bouches supplémentaires.

La crise devrait être une occasion de voir les choses en face, de ne pas se laisser duper par les tours de passe-passe illusionnistes que permet la doxa économique. L’un d’eux exploite le mode de calcul du PNB pour donner une image mirifique de la croissance qui est en réalité simplement comptable. Le gonflement du PNB intègre toute sorte de dépenses et les fait apparaître comme des gains ! Dans les pays africains ce gonflement signifie simplement une pénétration accrue des rapports marchands et monétaires dans la production sans amélioration du niveau de vie ; bien au contraire. Un autre est le lancement de nouveaux produits dont la publicité nous persuade que nous ne pouvons nous en passer alors que personne n’en avait éprouvé le besoin auparavant. Cette course perpétuelle après un superflu facteur de standing et non de bien-être, observable sous des formes caricaturales chez les « jeunes », par exemple, fut longtemps un des moteurs de la croissance. Celle-ci ne crée pas des biens, mais des maux. Loin de produire des vraies richesses, elle gaspille des ressources irremplaçables. On commence à peine à s’apercevoir de son coût masqué colossal. Quand une grande ville comme New Orleans est détruite, quand la mer envahit les terres des paysans bangladais, quand des maladies respiratoires handicapent ou tuent des millions d’hommes on devrait présenter la facture aux industries polluantes et aux politiciens qui les autorisent.

La « croissance durable est un non-sens car « durable » signifie à long terme or à long terme une croissance quelle qu’elle soit est mathématiquement impossible. Toute médication  portant ce nom conduirait non pas à sauver le malade mais à prolonger son agonie.  On produira toujours plus (quel intérêt ?) dans une nature de plus en plus déréglée entraînant des convulsions sociales et internationales de plus en plus violentes jusqu’au spasme atomique final. En revanche la décroissance sera tout le contraire de ce que dit M. Delhommais si elle est le résultat de mesures rationnelles mettant la techno-science au service de la biosphère et de l’homme au lieu de la laisser soumise aux lois sacrosaintes du marché qui à court terme nous ont précipité dans la crise et à long terme nous conduiront à la catastrophe. La mise en œuvre d’une telle politique exigera un changement dans l’allocation de ressources ; non pas moins mais plus d’investissements, plus de travail, plus d’inventivité. Son résulta atténuera les effets environnementaux du laisser faire antérieur, écartera les calamités dont nous sommes menacés si nous poursuivons dans la voie ancienne et nous conduira vers un model économique et social différent dans lequel nous consommerons moins mais mieux, nous posséderons de vrais biens quantitativement moindres mais qualitativement meilleurs que les vanités que nous sommes assez stupides pour rechercher aujourd’hui.         

 

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15/11/2008

Un mécénat contre l'art ?

 

Brève intervention de Kostas Mavrakis lors d’une réunion sur le mécénat d’art organisée par le parti Radical à l’Assemblée Nationale avec la participation de MM. Jean-Jacques Aillagon, Pierre Cornette de Saint-Cyr, Jean Perfetto, Rémy Aron et Pierre Gilou.

 

On ne peut dissocier la question du mécénat de la question de ses bénéficiaires. Sur ce point, la transparence devrait être de rigueur. Nos fonctionnaires qui achètent des œuvres pour les collections nationales sont-ils guidés par des critères ? Si c’est le cas, qu’on nous dise lesquels, sans quoi il nous faudrait admettre que leurs choix sont le fruit du caprice. Deux siècles après la Révolution, vivons-nous toujours sous le règne de l’arbitraire ? M. Cornette de Saint-Cyr a répété d’un air pénétré que Louis XIV achetait de l’art contemporain. Ce souverain appliquait le critère infaillible énoncé par Molière à savoir que « la grande règle de toutes les règles est de plaire ». Aujourd’hui, on applique le critère inverse d’où la grande misère de l’art à notre époque. De plus, on nous cache les montants déboursés pour telle ou telle acquisition de peur sans doute de choquer le bon peuple qui serait effaré par la disproportion entre des sommes astronomiques et la pauvreté des propositions prétendument artistiques dont même le journal Le Monde reconnaissait récemment la nullité en termes d’invention formelle (cf. Philippe Dagen, 1er nov. 2008). La nature des objets en question est en fait connue mais elle n’est pas pensée faute d’un terme adéquat pour désigner les objets susdits. Ce terme est « non-art ». En finançant celui-ci, les politiciens au pouvoir font des cadeaux onéreux à des multimillionnaires maxi-collectionneurs, validant leurs choix, honorant la sûreté de leur goût et les faisant gagner à tous les coups dans leurs jeux spéculatifs. Le mécénat des entreprises fait entrer leurs dirigeants dans un club très sélect. Le mécénat d’Etat vise à faire occuper la place de l’art. par le non-art. En exposant Jeff Koons à Versailles et Jan Fabre au Louvre, les responsables qui décident en notre nom permettent au non-art de parasiter l’art et de prendre en otage les visiteurs des musées. Que dire enfin du « mélange des genres » qui frise la prise illégale d’intérêts quand le commissaire priseur Cornette de Saint-Cyr est nommé à la direction du palais de Tokyo et que l’ex-patron de la fondation Pinault, M. Aillagon, met le palais de Versailles au service de la promotion de Jeff Koons, un anartiste très présent dans la collection du même Pinault ? Nous avons clairement affaire à un mécénat contre l’art. Dans ces conditions le meilleur service que puisse rendre l’Etat aux artistes serait de mettre un frein ou même un terme à sa munificence.    

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24/06/2007

Alain Badiou et l'Afrique

Il y a peu, j'ai consacré une note à la sollicitude de Badiou pour les Africains malades du sida. Il y aurait encore beaucoup plus à dire sur son humanitarisme tiers-mondiste digne de mère Thérésa. Considérons le troisième chapitre de son livre Le Siècle. Il y parle du nombre, "fétiche des temps actuels" car "là où le réel vient à défaillir se tient le nombre aveugle" (p 46). Pourtant il tient à faire comme les autres. "Moi aussi, dit-il [...] je vais y aller de mes nombres (p 47) et de nous asséner ses statistiques favorites (connues de chacun) sur les sidéens soignés chez nous mais guère dans les pays sous-développés, sur la pauvreté dans le monde, sur son aggravation dans quelques pays etc. en insistant sur "l'Afrique crucifiée".

Badiou qui n'a jamais étudié l'économie, bien qu'il soit marxiste, oublie un certain nombre de faits élémentaires. Grâce à l'Europe, le sida ne risque pas de dépeupler l'Afrique. Ce n'est pas l'Europe qui a infecté l'Afrique mais le contraire. Saboter la recherche médicale (en annulant les brevets) n'est pas le bon moyen de soigner les malades. La philanthropie n'a pas sa place dans les relations internationales où règnent les rapports de force. L'Afrique a été crucifiée par les siens : les Amin Dada, les Mugabé, les Taylor, les Hissène Habré, les Bokassa. J'en passe et de meilleurs (de plus monstrueux). Le pire intellectuellement est que Badiou raisonne comme si les richesses dans le monde existaient indépendamment du travail, si bien que la seule question qui se poserait concernerait la distribution de ses richesses. Comme les hommes sont égaux en droits, il faudrait (croit-on comprendre) que leur parts dans le partage soient égales sans considérer leur contribution à la production.

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